Cette petite croix, gravée en creux, occupe le point sommital d’un écusson en granit inséré dans une maçonnerie crépie moderne, témoignant vraisemblablement d’un réemploi. L’écu adopte une forme en accolade, encadrée par une mouluration en relief soulignant sa silhouette. Dans la partie supérieure, on distingue clairement le monogramme IHS (ou IHM, variante graphique), abréviation du nom de Jésus en grec (ΙΗΣΟΥΣ). Ce christogramme, largement diffusé à partir de la fin du Moyen Âge, devient très fréquent dans la sculpture religieuse de la Renaissance et des périodes modernes. Le champ inférieur de l’écu semble orné d’un motif circulaire ou rayonnant, aujourd’hui très érodé (constaté en 2025). Sa nature exacte reste indéterminée : il pourrait s’agir d’un cœur enflammé, d’un soleil rayonnant, ou d’un décor héraldique stylisé. Sous l’écu, une date gravée, probablement « 1574 », renvoie à la seconde moitié du XVIᵉ siècle. L’ensemble témoigne d’une volonté d’affirmation religieuse ou sociale, caractéristique des demeures rurales ou bourgeoises de cette période. Les pierres datées et armoriées sont fréquentes dans la Creuse, elles marquent souvent la construction ou la réfection d’une maison, l’appartenance religieuse de ses occupants, ici soulignée par la présence du christogramme IHS, ou encore la présence d’une famille notable, représentée par un écu. La diffusion du monogramme du Christ au XVIᵉ siècle reflète un contexte de piété affirmée, il devient un signe visible de foi, apposé sur les linteaux, clés de voûte et pierres d’angle. Cette pierre s’inscrit ainsi dans la tradition religieuse et décorative des constructions creusoises du XVIᵉ siècle, où le symbole du Christ côtoie volontiers les marques de propriété ou les armoiries domestiques.
Source : Claude Royère